Ceux qui les défendront(«Meuse» 7 septembre 1996 pg 9)
Ceux qui les défendront
«
Me Julien Pierre a été commis d'office pour la défense de Marc Dutroux
Me Philippe Darge, avocat de Michèle Martin: «Je vais essayer de comprendre ce rejet d'assistance aux enfants » M e Julien Pierre, du barreau de Liège, a été commis d'office pour assurer la défense de Marc Dutroux. Me Pierre était hier matin à Arlon où est détenu Dutroux. Il nous a confirmé avoir accepté cette tâche délicate mais refuse de faire la moindre déclaration, estimant la discrétion de rigueur à l'heure actuelle. Par contre l'avocat de Michèle Martin, MePhilippe Darge, du barreau d'Arlon, a accepté de répondre à nos questions.
Me Darge a une réputation d'avocat d'assises bien établie dans la province de Luxembourg. Une réputation qui est certainement parvenue jusqu'à la prison de Namur, puisque c'est de là que Michèle Martin lui a téléphoné fin de la semaine dernière pour lui demander d'assurer sa défense. Me Darge n'a donc pas été commis d'office : «J'ai eu un très long entretien avec elle. J'ai réfléchi et j'ai pris la décision d'accepter. Nous vivons dans un État de droit; chaque accusé, quelle que soit l'horreur des faits reprochés, doit pouvoir être défendu sereinement. Je serai aux côtés de Mme Martin pour tenter de comprendre l'incompréhensible et pour faire face à ses juges, en souhaitant qu'elle ait droit à une justice sereine, objective et donc équitable. » L'avocat ajoute « Cela n'enlève rien au fait que, comme
Me Darge déclare ne pas avoir de craintes, ni pour lui-même, ni pour son entourage ou encore pour sa clientèle : « Pourquoi aurais-je des craintes? Pour cela, il faudrait que j'aie fait le mal, or ce n'est pas le cas.
Je fais mon métier lucidement. Pourquoi ferait-on l'amalgame entre l'avocat et sa cliente? Je suis confiant en la nature humaine. J'espère pouvoir faire mon métier au calme.
Ceux qui me connaissent savent que dans tous les dossiers délicats que j'ai traités, j'ai toujours fait la part des choses, sans épouser aveuglément la personnalité du client. »
Sous influence
Me Philippe Darge a donc rencontré longuement Michèle Martin. Il précise : «Je dois avoir accès au dossier dans les prochains jours et j'en saurai davantage. A l'heure actuelle, je ne sais que ce que Mme Martin me déclare. » L'avocat en vient alors au contenu de ce premier entretien et donc à la version de sa cliente : « Elle a vécu sous l'influence de M. Dutroux pendant des années et, depuis juin '95, elle est enfermée dans un système qui paraît lui avoir été imposé, dont elle n'a pas su ou pas pu se sortir, en allant jusqu'à admettre que deux gamines étaient en train de mourir. » Car c'est bien là la question. Dans ses derniers aveux, Michèle Martin a reconnu qu'elle n'avait pas été nourrir Julie et Mélissa alors qu'elle les savait prisonnières. Me Darge : « C'est cela qui est fou. Je vais essayer de comprendre ce rejet d'assistance aux enfants. Elle me dit qu'elle n'a pas su aller les nourrir, qu'elle n'y arrivait pas. Ma question est: pourquoi ? » Quant à savoir si Michèle Martin a des remords, son avocat répond: « Elle n'en dort plus. Elle est consciente d'avoir participé, à la place qui était la sienne, au déroulement d'un calvaire, d'un drame. Elle me dit que Dutroux -dont elle vivait séparée – a enlevé ou fait enlever les gamines sans qu'elle ne participe. Elle n'avait jamais vu les fillettes avant l'incarcération de Dutroux. A ce moment, il l'a chargée, elle entre autres, de les nourrir, mais en lui précisant qu'elles avaient de la nourriture en réserve pour eux mois »...
En ce qui concerne An et Eefje, Michèle Martin a dit être au courant de leur enlèvement et de leur décès. Mais elle ne sait pas pourquoi, ni comment, les deux jeunes filles ont été tuées. Pour l'avocat, l'instruction devra déterminer le mécanisme psychologique qui a amené une mère d'un enfant en bas âge à agir de la sorte.
Marc Durant
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Comme tous ses confrères, il s'est engagé par serment à ne conseiller ou défendre « aucune cause que je ne croirai pas juste en mon âme et conscience ». Cette notion de cause juste peut aussi être invoquée par l'avocat commis d'office, qui garde la liberté de refuser de défendre un client. La commission d'office d'un avocat ne peut se faire que par les autorités du barreau au sein duquel il est inscrit. L'avocat approché peut demander un délai de réflexion, il doit motiver son refus mais personne ne peut l'obliger à accepter une cause.
Mais le barreau ne devrait-il choisir que de défendre les «bonnes» affaires et ne pas intervenir lorsque le cas est impopulaire? Tout le monde a le droit d'être défendu.
Qui reprocherait au bâtonnier Franchimont - chez qui d'ailleurs Julien Pierre fit son stage - d'avoir défendu aux assises de Liège Louis Dupont, mieux connu sous l'appellation de « le curé de Kinkempois » ?
Qui se souvient que dans cette sordide affaire, jugée à huis clos, un des avocats de Davison - un des deux principaux accusés reconnu coupable de viols de mineures d'âge - était Me
Me Julien Pierre à la défense de Dutroux, ce n'est pas étonnant. Il s'adresse habituellement au jury populaire avec hauteur. L'opinion du grand nombre n'est pas pour le troubler.
On l'a vu à Liège dans de nombreux procès d'assises. Timide et muet dans l'affaire Amédéo (un restaurateur accusé d'un double assassinat et acquitté) il apprenait alors le métier en écoutant plaider les aînés. Il a depuis pris de l'assurance: on l'a vu notamment dans l’un des trois procès de l'ex-avocat Systermans ; son client était le chauffeur de bus soupçonné d'avoir posé la bombe au palais de Liège. Il fut acquitté. On l'a vu plaider à Arlon aux côtés de Me Philippe Darge (il défend aujourd'hui Michèle Martin) dans un procès dont le film « Les Amants d'assises» a été tiré. Il a surtout été remarqué quand, faisant fi de la couleur politique qu'il revêtait - socialiste - il accepta d'être un des avocats des membres de P.F.N. et d'Agir dont une quinzaine de membres étaient poursuivis en correctionnelle à Liège en 1992 pour incitation à la haine raciale, un dossier qui n'est d'ailleurs pas terminé.De souche ardennaise, persévérant, tatillon, curieux - quels noms va-t-il découvrir à la lecture du dossier Dutroux ?
Julien Pierre a son cabinet au Mont St-Martin à Liège, à un jet de pierre de la basilique où des milliers de Liégeois ont pleuré aux funérailles de Julie et Mélissa.
Bien sûr, toute
Les personnes qui ont des enfants ou des petits enfants sont nettement plus troublées que les célibataires.« Mais ceux qui sont le plus perturbés, et c'est tout à fait normal, ce sont ceux qui ont subi des sévices sexuels
- même s'il y a très longtemps de cela - et les personnes fragiles qui ont déjà suivi un traitement psychologique. Il est logique que dans une période comme celle-ci, ils fassent appel à un médecin ou à un psychologue.
Pour le professeur Ansseau,
- Deux petites filles ont été enlevées, ce qui est déjà une chose horrible car, à 7 ou 8 ans, une gamine est le symbole de la gentillesse, de l'innocence et de la pureté.
- Elles ont été incarcérées dans des conditions épouvantables et pendant longtemps et ont été victimes de violences sexuelles.
- Elles sont mortes de faim, ce qui représente le comble de l'horreur.
Mais, à tous ces éléments qui entraînent un sentiment d'horreur, il faut encore ajouter que beaucoup de gens n'ont plus de points de repères, ajoute le professeur Ansseau. Par exemple, à cause de cette affaire, nombreux sont ceux qui ont totalement perdu confiance dans
Enfin, ce qui frappe aussi, c'est à la fois la personnalité des victimes et celle de Dutroux. « Il est certain que nous aurions été moins traumatisés si on avait kidnappé et assassiné le fils d'un important PDG, souligne encore le professeur Ansseau.
Mais dans ces affaires, ce sont les enfants de monsieur Tout le Monde que l'on a enlevés. Et Dutroux, lui aussi, est assimilé à n'importe lequel d'entre nous.On oublie facilement qu'il a déjà été condamné pour pédophilie mais on se dit qu'il aurait pu être notre voisin. »
Bref, pour le professeur Ansseau, le sentiment de malaise que nous éprouvons tous est non seulement explicable mais justifié. Mais bien sûr il finira par s'estomper. Le temps arrange toujours les choses. « Mais il faut aussi que le public retrouve ses marques, c'est-à-dire la confiance dans
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Hier, au palais royal de Bruxelles, on a d'abord vu arriver les parents de la petite Nathalie Geijsbregts (10 ans) qui avait disparu le 26 février 1991 en attendant le bus à Bertem (Louvain).
Puis, ce fut au tour des parents du petit Liam Van den Brande (2 ans) qui a disparu à Malines il y a quelques mois du jardin de sa maison. La police pense qu'il s'est noyé dans le petit canal qui longe le jardin mais on n'a jamais retrouvé son corps.
Enfin, ce fut au tour de la maman et de la sueur d'Ilse Stockmans (19 ans), qui a été vue pour la dernière fois à la gare de Louvain le 17 février 1987. Elle avait des problèmes de perte de mémoire et prenait des médicaments.
Avec tous, les Souverains ont d'abord écouté leur histoire avant de leur faire part de leur soutien total.
Par ailleurs, on a appris que le papa de la petite Élisabeth Brichet, disparue à Namur en 1989 à l'âge de 12 ans, a quant à lui refusé cette invitation royale, prétextant que la justice ne l'avait jamais écouté depuis toutes ces années et que ce n'est pas une invitation royale qui allait tout effacer.
Il s'agissait de vanter un parfum à grand renfort d'affiches montrant, tantôt un couple féminin, tantôt un couple mixte. Dans tous les cas entièrement nu et enlacé. Et dans tous les cas aussi d'une grande jeunesse...
Un mal heureux concours de circonstances a voulu que cette campagne, programmée depuis le début de l'année, fleurisse sur quelque 2.600 espaces publicitaires de l'agence Decaux, en plein mois d'août. Alors que l'horreur de l'exploitation sexuelle de la jeunesse éclatait à la face de
Résultat: c'est par centaines que les abribus du pays ont été pris d'assaut par des inconnus. Qui se sont mis, de nuit généralement, à badigeonner de peinture noire les affiches de la campagne. Sous prétextes de croisade contre la pédophilie... Le tout accompagné d'une vague d'insultes et de menaces parvenues au siège des deux sociétés. Où on a du mal à comprendre pareils agissements.
« Quel mal y a-t-il à adopter une attitude positive vis-à vis de l'amour et de la tolérance ? » s'interroge-t-on chez Mexx. Où on se défend vigoureusement de vouloir choquer ou offenser en utilisant le nu de la jeunesse. « Les modèles utilisés sont des adultes, les images très discrètes et élégantes et les parties intimes du corps ne sont absolument pas visibles.» Autant d'arguments qui n'ont pas convaincu une poignée d'exaltés réunis dans une mystérieuse association, l'APAP. Du côté de chez Decaux, on se montre d'autant plus étonné que les déprédations, sur tout enregistrées à Anvers l'ombre du Vlaams Blok ? et à Bruxelles, ont épargné Charleroi et Liège.
Même limité, ce premier accès violent de puritanisme laisse-t-il présager un regain de prétendue moralisation?
Spécialiste de communication sociale à l'UCL, Gabriel Ringlet ne le pense pas. Et ne le souhaite certainement pas: « Dans le climat actuel, un regain de puritanisme n'est pas à exclure à court terme. Mais autant il faut dénoncer les crimes horribles que l'on découvre, autant il convient de garder une attitude sereine à l'égard de tout ce qui touche à une sexualité saine. Or, un excès de puritanisme peut conduire à un excès de débauche. Je doute que le sursaut actuel de conscience de la population verse dans un terrorisme moralisateur aussi stupide qu'on le connaît aux États-Unis. » N'empêche : un annonceur viendrait de renoncer à afficher des enfants, par les temps qui courent. Gare à la chasse aux sorcières...
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L'union belge de football a demandé à tous les stades qui accueilleront une de leurs compétitions ce week-end d'observer une minute de silence en la mémoire d'An et Eefje. Tous les joueurs, arbitres et supporters avaient déjà fait de même lors du décès de Julie et Mélissa.
« Quelles leçons ceux qui nous gouvernent tirent-ils de l'affaire Dutroux ?
Comment remédier aux carences constatées dans les différentes enquêtes ?
Que faire avec les grands criminels après leur arrestation ? Peines incompressibles, peine de mort ? »
Ce seront les questions abordées lors du débat «Mise au point» de dimanche midi à la
RTBF. Avec comme invités : Nathalie de t'Serclaes (PSC), Jacques Simonet (PRL-FDF),Thierry Giet (PS), Vincent Decroly (Ecolo).
On annonce la présence sur le plateau, sous réserves, de Marie-France Botte, du conseiller général de la police judiciaire auprès du parquet Christian De Vroom, de Me Michel Graindorge, de la présidente de la commission de probation Francine Lyna, de la présidente de l'association syndicale des magistrats Christine Matray, du papa de la petite Mélissa Gino Russo, et du magistrat national André Vandooren.
A l'occasion des funérailles de An et Eefje, le gouvernement présente ses très sincères condoléances aux familles Marchal et Lambrecks. II s'associe à toutes les marques de sympathie et de soutien témoignées par l'ensemble de la population belge.
Comme lors des funérailles de Julie et Mélissa, le gouvernement fédéral sera représenté par le ministre de
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