samedi 14 novembre 2009

Enlèvements et vols d'autos: deux dossiers à Neufchâteau ( «Le Soir»28 décembre 1996 pg 3)


Enlèvements et vols d'autos: deux dossiers à Neufchâteau

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

Marc Dutroux

Aujourd'hui âgé de 40 ans, Marc Dutroux apparaît comme « le chef » du réseau de pédophiles en cours de démantèlement. A ses premiers aveux, qui ont permis la libération de Sabine et Laetitia et la découverte des corps de Julie et Mélissa, semble succéder un mutisme qui n'empêche cependant pas l'enquête de se déployer. Au lendemain des enlèvements de Julie et Mélissa, Dutroux fut considéré par la gendarmerie, qui monta les opérations secrètes Othello et Décime, comme le principal suspect des rapts.

L'homme, incarcéré en 1985 pour l'enlèvement et le viol de mineures d'âge, avait été condamne en 1989 à 13 ans de prison. Il avait été libéré en 1992.

Détenu.

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Michel Nihoul

Cet «agent immobilier» bruxellois serait la tête pensante du réseau Dutroux. Il pourrait avoir servi d'interface entre le pédophile et les clients de la filière. Nihoul fréquentait assidûment les milieux politiques bruxellois. Il était aussi grand maître d'une confrérie brassicole. Mais l'homme est aussi un escroc. Arrêté dans le cadre de l'affaire Dutroux. Le tribunal correctionnel de Bruxelles poursuit son procès. Il avait monté une fausse association caritative, «SOS Sahel». L'homme se déplace dorénavant à l'aide de béquilles. Il semble malade. Mais il n'a pas encore avoué tout ce qu'il sait. Et les enquêteurs sont certains qu'il détient les clés de l'enquête.

Détenu.

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Michèle Martin

L'épouse de Marc Dutroux fut condamnée à 3 ans de prison en 1989 pour complicité dans la séquestration et le viol par son mari de deux mineures d'âge. Michèle Martin fait figure de «rabatteuse». Elle aurait pu repérer les fillettes à enlever. Des témoins affirment l'avoir vue à Grâce-Hollogne peu avant l'enlèvement de Julie et Mélissa. C'est également elle qui aurait dû nourrir les deux fillettes, séquestrées à Marcinelle et abandonnées à leur sort après l'arrestation de Marc Dutroux dans le cadre d'une affaire de vol, en décembre 1995. Michèle Martin apparaît comme une femme sous influence, totalement assujettie aux perversions de Dutroux. Détenue.

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Michel Lelièvre

La biographie de Michel Lelièvre est peu connue. Ce jeune homme de 25 ans apparaît comme un vagabond autorisé par le couple Dutroux-Martin à partager sa table et à squatter l'un de ses taudis.

Cette mansuétude était «remboursée » par les menus travaux que Lelièvre, ferrailleur-bricoleur, accomplissait pour ses hôtes dans leurs propriétés.

Il y avait aussi des «services» plus immondes. Lelièvre, totalement inféodé aux phantasmes criminels de son maître, est suspecté d'avoir été le docile complice de Dutroux dans l'exécution des enlèvements d'enfants, dont celui d'An et Eefje à Ostende, et d'avoir prêté son concours à la garde des gamines séquestrées.

Détenu.

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Michel Diakostavrianos

Ce garagiste surnommé «Michel Le Grec» est impliqué dans les deux principaux volets du dossier Dutroux: les meurtres et les enlèvements d'enfants et l'assassinat de Bernard Weinstein. Interpelle plusieurs fois avant d'être arrêté par le juge Connerotte, Michel Diakostavrianos vendait des pneus d'occasion, rachetés en Allemagne. Il fréquentait les dancings de la région de Charleroi, accompagné de filles originaires de Slovaquie, le pays dans lequel Marc Dutroux et ses complices se rendaient régulièrement. Une commission rogatoire belge s'est rendue en Slovaquie. Elle y a enquêté sur les activités de Dutroux : pornographie et prostitution.Détenu.

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Bernard Weinstein

Le 17 août 1996, alors que les enquêteurs viennent d'exhumer les dépouilles de Julie et Métissa à Sars-la-Buissière, ils mettent également au jour un troisième corps, celui de Bernard Weinstein. Ce petit truand français a été assassiné par Dutroux qui reprochait à son « lieutenant» de renseigner la police sur son compte. Weinstein vivait dans le châlet de la rue Daubresse, à Jumet, où les corps d'An et Eefje ont été retrouvés. En novembre 1995, la police investit les lieux et y libéra trois personnes séquestrées par Weinstein. Dutroux, se croyant «doublé» par son complice, lui fit avaler une tartine au Rohypnol (un puissant somnifère) et l'enterra vivant.

Assassiné.

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Annie Bouty

Inculpée «d'association de malfaiteurs ayant participe a des enlèvements et à la séquestration d'enfants» Annie Bouty est l'ex-femme de Michel Nihoul.

Cette ex-avocate avait été rayé du barreau de Bruxelles après avoir été condamnée pour escroquerie au détriment de réfugiés politiques. Elle avait déjà été arrêtée en 1983 à Liège pour avoir suscité un faux témoignage. Elle conservait avec Nihoul des contacts suivis. Les enquêteurs estiment qu'elle connaissait les activités de son ex-mari.

Libérée.

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Georges Zicot

Cet inspecteur principal de la police judiciaire de Charleroi, âgé de 45 ans, a été présenté comme le protecteur possible de Marc Dutroux, ce que Georges Zicot et ses avocats démentent.

Figure de proue du volet «vols de voitures» ouvert à Neufchâteau, le policier se dit victime de la guerre des polices qui oppose la PJ à la gendarmerie. Georges Zicot a rédigé un faux PV dans l'affaire du camion volé, permettant ainsi à Gérard Pinon (voir ci-dessous) de toucher une prime d'assurance.

Libéré.

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Marleen De Cokere

Arrêtée le 24 septembre pour «participation à une association de malfaiteurs notamment impliquée dans des faits d'enlèvements et de séquestration de mineurs d'âge, de séquestration de mineurs d'âge et de trafic de stupéfiants», Marleen De Cockere, âgée d'une quarantaine d'années, était l'une des compagnes de Michel Nihoul. Ils s'étaient rencontrés au Dolo, ce café d'Etterbeek où étaient organisées des parties fines.

Les enquêteurs la soupçonnent de partager les secrets de Nihoul.

Libérée.

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Gérard Pinon

Ce commerçant est le propriétaire du hangar où un camion volé par la bande Dutroux avait été caché.

Pinon était un indicateur de l'inspecteur Zicot.

Il avait dénoncé Weinstein et Dutroux au policier qui, pour le protéger, avait rédigé un faux PV, indiquant que le camion volé avait été retrouvé sur la voie publique.

Gérard Pinon avait été dénoncé aux enquêteurs de Neufchâteau par Marc Dutroux. Celui-ci soutenait qu'il l'avait aidé à assassiner Bernard Weinstein, ce que le commerçant nie farouchement.

Libéré.

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Claude Thirault

Inculpé d'association de malfaiteurs, cet ancien locataire de Dutroux porte des accusations graves contre la gendarmerie:

En 1993, Dutroux, qui savait que l'avais besoin d'argent m'a proposé 150.000 F pour enlever deux jeunes filles. J'ai alors balancé Dutroux à la gendarmerie de Charleroi dont d'étais l'informateur. J'ai parlé des travaux qu'il faisait dans ses maisons.

J'ai donné ses plaques de voiture. Pourquoi n'ont-ils damais vérifié ? Des affirmations que la gendarmerie dément catégoriquement.

Libéré.

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Pierre Rochow

Impliqué dans une affaire de camion volé, Pierre Rochow avait été séquestré avec un ami et une jeune femme par Dutroux et Weinstein, qui lui reprochaient de les avoir «doublés».

Libéré.

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Thierry Dehaan

Patron du service des « affaires spéciales » de la Royale belge, il est soupçonné d'escroquerie à l'assurance, ayant octroyé une prime de 150.000 F à Pinon pour la restitution d'un camion volé. Un procédé qui bénéficiait, affirme Dehaan, de l'accord de la compagnie.

Libéré.

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Deux « Chevaliers blancs » sur le chemin de la vérité

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

Jean-Marc Connerotte, le justicier chestrolais

Propulsé depuis deux mois à l'avant-plan de la scène médiatique par l'affaire Dutroux, le juge Jean-Marc Connerotte s'était fait tailler par l'opinion,bien malgré lui, les habits d'un «Chevalier blanc» pourfendant l'horreur, animé par le seul désir qu'éclate enfin et rapidement la vérité sur les meurtres et les enlèvements d'enfants. (...)

Et subitement sa ville, Neufchâteau, était sortie du ronron paisible des bourgades tranquilles de province, devenant, aux yeux de la Belgique, le lieu où l'œuvre de justice allait s'exercer en pleine rigueur. (... )

Perdu au loin et auréolé de cette présomption d'authenticité qui confère au «petit juge» la capacité

«d'aller jusqu'au bout», le magistrat ardennais allait se donner des moyens attestant de la gravité de l'affaire. (...) Un dispositif grandiose, intelligent, cohérent, orchestré par « le justicier ».

Jean-Marc Connerotte a un visage et une allure. Il n'avait, jusqu'à l'appel au calme qu'il a bredouillé face aux caméras, pas de voix. (...) Dessaisi pour s'être trop exposé, le juge de Neufchâteau demeure et restera un inconnu. (...)

Raillé par certains magistrats qui voient en lui un « petit juge de province » (...), le juge Connerotte s'était déjà distingué en révélant la filière des titres volés qui devait mener, selon lui, aux assassins d'André Cools.

La «guerre des juges'> qui avait abouti à son dessaisissement en 1994 au profit de Mme Ancia, avait entrelacé les premières mailles de son habit de «Chevalier blanc ».

Article paru le 15 octobre

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Michel Bourlet, procureur têtu et tenace

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

Michel Bourlet, 47 ans, et Jean-Marc Connerotte, un an de plus, c'est en apparence le chêne et le roseau.

Le procureur paraît solide comme l'arbre séculaire. Le juge, léger comme une plume. Pourtant, ni l'un ni l'autre ne plie, ne se rompt. Ils travaillent sans relâche, avec obstination, comptant les nuits blanches, mais ils sont toujours debout. (...)

Chapitre loisirs, le procureur râle : J'aimerais quand même bien tondre ma pelouse. Car le procureur a son côté cour, au palais, et son côté jardin. Chez les Bourlet, un zeste écologiste parfume le quotidien. Dans l'enceinte de l'ancien moulin, leur demeure, l'épouse, Dominique, s’occupe du potager; le magistrat, du jardin d'agrément. Michel Bourlet adore aussi la musique.

Depuis peu, depuis qu'une de ses filles le guide sur les portées, il s'est mis au piano. Il se réfugie aussi dans la chanson française: Ferré, Nougaro, etc.

On l'a déjà surpris d'humeur taquine, fredonner du François Béranger. C'est que le procureur a conservé un petit côté canar», héritage de 68.

Michel Bourlet, fils et frère d'avocat, a quitté la Cité ardente après un bref passage au barreau et au tribunal de la jeunesse. Il a débarqué à Neufchâteau, d'emblée comme procureur, en 1984.

Il dirige son parquet d'une main de maître, qu'il met à la pâte.

Car le procureur monte au créneau, n'hésitant pas à requérir. Au même rythme que ses substituts, il prend ses tours de garde.

Article paru le 5 septembre

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Un déploiement de moyens techniques exceptionnels

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

Des moyens techniques exceptionnels ont été mis en oeuvre par les enquêteurs. Il y a d'abord le radar de sol loué en Angleterre à une firme privée et dont l'usage est dirigé par le superintendant britannique John Bennet. Ce radar, généralement utilisé par des archéologues, permet de scruter le sol sur plusieurs mètres de profondeur.

Grâce à la très haute fréquence de ses ondes, les techniciens qui le manipulent traquent les différences de densité du sol. Ces différences trahissent la présence d'un objet qui y est dissimulé ou, plus simplement, une couche de terre plus meuble (...) Des caméras thermiques sont également utilisées par les enquêteurs. (...) Elles peuvent révéler des différences de température le long de maçonneries et ainsi trahir l'existence (...) de caches ou de passages secrets. (...) Les architectes sont également mis à contribution. Ils confrontent les plans et les volumes extérieurs des immeubles suspects aux volumes intérieurs.(...)

Le flair de chiens spécialement dressés pour retrouver des corps est aussi sollicité. Il s'agit soit de chiens «belges», soit de chiens venus de l'étranger (Allemagne et Pays-Bas), spécifiquement entraînés à retrouver des cadavres. Au flair de ces chiens vient encore se joindre celui du «Nez» hollandais (notre photo).

Il s'agit en fait du surnom d'un inspecteur de la police néerlandaise dont l'odorat particulièrement développé a déjà permis de résoudre certaines enquêtes.

Article paru le 4 septembre

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Stefaan De Clerck

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

Sautant d'une voiture pour grimper alertement les marches du palais de justice de Neufchâteau; penché vers les parents pour les réconforter; répondant sans excès ni détours aux questions parlementaires ou journalistiques; convoqué au Palais pour rendre compte au Roi: Stefaan De Clerck est l'un des rares hommes politiques à être monte au front alors que l'affaire Dutroux giflait la Belgique. L'opinion le lui rend bien en le faisant rapidement grimper l'échelle de la popularité. C'est un paradoxe: les errements de la Justice, le département dont il a la charge, sont désignés unanimement comme la source du chagrin des Belges.

De Clerck assume et promet des réformes. Dehaene lui emboîte le pas.

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Anne Thily

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

Frais émoulu, le procureur général de Liège Anne Thily, première femme à accéder à cette haute fonction, a été contrainte d'assumer l'héritage des affaires sensibles non résolues sous le règne de son prédécesseur admis à l'éméritat, Léon Giet.

Ses premiers mois à la tête de la cour d'appel de Liège voient successivement éclater l'affaire Dutroux, les rebondissements extraordinaires de l'affaire Cools et la mise en cause de deux de ses avocats généraux, Marc de la Brassine et Franz-Jozef Schmitz, l'un accusé de pédophilie et de captation d'héritage, l'autre d'abus de confiance.

Et « I'enquête sur l'enquête Dutroux » pourrait encore lui réserver d'autres soucis.

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Dutroux un suspect démasqué trop tard

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 3

1985

14 mars. : Marc Dutroux est arrêté pour viol et vols qualifiés et détenu préventivement à Mons.

1986

3 février. : Arrestation de Marc Dutroux pour viol, séquestration et vols

1989

26 avril :Dutroux est condamné, en appel à Mons, â 13 ans et 6 mois de prison.

Michèle Martin écope de 5 ans.

1992

6 avril. Marc Dutroux bénéficie d'une libération conditionnelle.

1993

21 octobre : Le premier maréchal des logis P. reçoit des informations qui font état de travaux effectués par Marc Dutroux dans les caves d'une de ses maisons à Marchienne-au Pont : des cellules pour enfants.

8 novembre. : La gendarmerie de Charleroi effectue une série de perquisitions. A Marchienne-au-Pont, les gendarmes constatent que des travaux sont bel et bien en cours.

10 décembre. La gendarmerie de Charleroi demande au juge d'instruction Lorent d'autoriser l'opération de surveillance «Décime ».

1994

5, 6 et 12 janvier. : Le peloton d'observation, de soutien et d'arrestation (Posa) de Charleroi surveille Dutroux.

16 février. : Fin de l'opération « Décime ».

13 juin. Sur ordre du juge Lorent, les gendarmes de Charleroi procèdent à de nouvelles perquisitions.

1995

24 juin. : Julie Lejeune et Mélissa Russo sont enlevées à Grâce-Hollogne.

7 juillet. : Fax de la brigade de gendarmerie de Charleroi à la brigade de GrâceHoIlogne -qui enquête sur la disparition de Julie et Mélissa-. Les informations sur Dutroux sont communiquées.

27 juillet. : Le BCR envoie les photos et les documents sur Dutroux à Grâce-Hollogne.

28 juillet. Fax de la brigade de gendarmerie de Grâce-Hollogne gne à la BSR de Charleroi pour lui demander un contrôle des véhicules de Dutroux et Martin.

7 août. La brigade de Grâce-HoIlogne demande au BCR de constituer un dossier sur Dutroux.

9 août. Le BCR organise une réunion à laquelle participent les BSR de Charleroi, Thuin et Namur.

22 août. : Ann Marchal et Eefje Lambrecks sont enlevées à Ostende.

25 août. Le district de gendarmerie de Charleroi demande de lancer l'opération « Othello »

28 août. Le Posa Charleroi effectue la première observation de l'opération « Othello »

2 novembre. Le procureur du Roi Marchandise est informé, pour la première fois, de l'opération Othello.

5 novembre. Avec Weinstein, Dutroux séquestre trois adultes dans le cadre d'un règlement de comptes.

6 décembre. Dutroux est interpellé pour le règlement de comptes et la séquestration du 5 novembre.

13 décembre. La BSR de Charleroi effectue des perquisitions chez Dutroux. A Marcinelle, les gendarmes entendent des cris, mais ne découvrent pas la cache de Julie et Métissa.

19 décembre. Nouvelle perquisition à Marcinelle. Sans résultat.

1996

25 janvier. Les gendarmes interrompent « opération Othello ».

20 mars. : Le juge d'instruction Lorent libère Marc Dutroux.

28 mai. : Sabine Dardenne est enlevée à Kain.

9 août. : Laetitia Delhez est enlevée à Bertrix.

12 août. Marc Dutroux est interpellé.

15 août. : Libération de Sabine et Laetitia.

17 août. Les corps de Julie et Métissa sont découverts à Sars la-Buissière.

3 septembre. Les corps d'Ann et Eefje sont découverts à Jumet.

Septembre à décembre. Une trentaine de propriétés appartenant à Marc Dutroux ou fréquentées par lui sont méthodiquement fouillées. Sans résultat.

21 décembre. L'association sataniste « Abrasax » est perquisitionnée.

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