samedi 21 novembre 2009

L'assassinat d'André Cools enfin vers le dénouement ? ( «Le Soir»28 décembre 1996 pg 7)


L'assassinat d'André Cools enfin vers le dénouement ?

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 7

Quatre ans après le choc des révélations de l'Italien Carlo Todarello, qui désignait aux enquêteurs de Neufchâteau des proches collaborateurs de l'ancien ministre wallon Alain Van der Biest comme les organisateurs de l'assassinat d'André Cools, et l'ancien ministre lui-même comme le commanditaire, la

«Cellule Cools» sort de son chapeau des éléments nouveaux.

Ils ont été livrés par un énigmatique témoin-surprise et tous alignés sur le fil rouge des révélations de juin 1992.

Avec toutefois des «détails» très différents, tels que l'identité d'autres complices, arrêtés, ou la planque des tueurs, localisée. Liège, qui ne suivait plus guère la piste ouverte à Neufchâteau, réarrête soudain en septembre dernier les mêmes que... Neufchâteau en 1992 - Todarello, Taxquet, Solazzo, Di Mauro ,plus quelques autres dont deux Italo-Liégeois non identifiés à l'époque - Castellino et Contrino. L'ancien ministre Alain Vander Biest fait partie du lot, tandis que les deux tueurs présumés, amenés de Sicile par un certain Todaro en 1991, sont identifiés et arrêtés à Tunis.

Mais depuis septembre, l'enquête liégeoise n'a toujours pas permis d'identifier avec certitude le commanditaire de l'assassinat.

L'ancien ministre Van der Biest n'est pas le seul dont le nom est cité dans les premières déclarations de Todarello. A Tunis, les deux tueurs présumés, Abdel Majid et Abdel Jelil, disent n'avoir pas entendu parler ni de Van der Biest ni de Taxquet. Il n'est pas facile de trier le vrai du faux, dans ce dossier qui reste bancal.

Van der Biest n'a-t-il été qu'un pion, un poète piégé par son tempérament et par l'alcool ? A-t-il su et peut-être laissé faire? Ou est-ce lui le vrai commanditaire?

Beaucoup ont de la peine à l'imaginer. Et certains éléments retenus à sa charge semblent s'être allégés. La Justice l'a renvoyé devant le tribunal pour le dossier des « dépenses du cabinet» (procès le 3 mars), mais elle l'a écarté du rang des inculpés dans le dossier des «titres volés», que le tribunal aura à connaître cette année.

Les deux tueurs arrêtés à Tunis sont les seuls à avouer, tout en déclarant avoir été piégés et avoir ignoré jusqu'au bout qui était leur victime. Mais la découverte de l'arme du crime et d'autres résultats de l'enquête montrent que ce sont les hommes désignés dès 1992 par Todarelo à Neufchâteau qui ont bien été mêlés aux préparatifs, même si le rôle de chacun n'a pas encore pu être précisé par le menu.

Véritable rebondissement de l'enquête ou coup de théâtre orchestré? La question se pose d'autant plus qu'on ne connaît toujours pas le témoin-surprise dont Liège tait obstinément l'identité.

Rebondissement ou coup de théâtre survenu alors que Neufchâteau, écarté des dossiers, revenait précisément, avec l'affaire Dutroux, au tout premier plan de l'actualité, après trois ans d'une « guerre des juges » arbitrée en 1994 par la Cour de cassation, au profit de Liège.

Les critiques lancées à l'égard du commissaire de la PJ liégeoise Raymond Brose, accusé par certains d'avoir saboté l'enquête, l'ont contraint à céder à un autre officier la direction de la cellule, tout en poursuivant l'enquête sur les pots-de-vin liés aux contrats Agusta et Dassault.

Cette instruction devrait se clôturer au cours du premier semestre 1997 et donner lieu à un procès devant la Cour de cassation, sans doute en 1998.

C'est aussi dans la foulée des critiques adressées à la « cellule Cools » que la Chambre a décidé, en octobre, de créer une commission chargée d'examiner les enquêtes relatives à l'assassinat d'André Cools, sans entraver l'instruction judiciaire toujours en cours.

La commission Cools n'entamera ses travaux qu'après ceux de la commission Dutroux.

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Autoportrait d'un ex-ministre « Je ne suis plus rien »...

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 7

Alain Van der Biest, enfant prodige du PS, aura connu tous les bonheurs avant sa déchéance.

Né à Grâce-Berleur en 1943, d'une mère femme d'ouvrage et d'un père ouvrier chaudronnier,il ne fut jamais l'adepte de la gauche caviar.

Jeune mandataire, il raffolait des goûters de pensionnés, des contacts avec sa « base », des petites gens, des inconditionnels qui, aujourd'hui encore, continuent à croire en leur cher Alain.(...)

André Cools, dénicheur de talents, le remarque. Il va mettre le jeune VDB sur orbite. A 27 ans, l'assistant en linguistique de l'ULg devient secrétaire national du PSB; à 34 ans, il entre au Parlement. Il anime les activités culturelles du PS, écrit, se fait remarquer. Cools l'aime parce qu'il vient réellement d'un milieu ouvrier. (...)

En 1988. Li est ministre des Pensions, portefeuille qui paraît bien mal lui convenir, mais permet généralement d'assurer une infaillible notoriété.

En 1990, André Cools l'invite» « vivement à intégrer l'exécutif wallon qu'il dirige. C'est le début des ennuis, la fin de l'amitié avec celui qu'il avait caricaturé dans une «tragédie historique en deux actes» baptisée

«Les Barons ou le Prince de Flémalle».

Car l'autre Van der Biest, c'est l'écrivain au talent reconnu par de nombreux critiques. (...) Moraliste sans boussole, politique refusant la frime, Van der Biest trouve dans l'écriture un puissant dérivatif à la brutalité de l'activité politique. Son autre hobby, c'est l'imitation : il était le roi des blagues téléphoniques.

Un jour, croyant vraiment avoir eu affaire à Guy Spitaels, un député PS répercuta à la tribune un fameux « Happart, y en a marre» qui fit sensation...

Mais, à Namur, le « ministre des Affaires intérieures » allait avoir peu de temps pour rire. Il devrait rapidement affronter les difficiles dossiers de l'eau, des finances liégeoises, des rivalités entre les Carolos et les principautaires.

Cools ne le ménage pas, et l'entourage du ministre-président fait vite savoir à Van der Biest que sa carrière ministérielle est en péril. On ne lui pardone pas, du côté des coolsistes, ses sympathies pour les « perronistes », Happart et Dehousse.

En réalité, Van der Biest semble, une fois encore, tenter de jouer les médiateurs. Cela doit correspondre à son tempérament, plutôt tendre, en proie à un doute permanent.

En tout cas, l'homme qui jugeait qu'il fallait travailler moins une fois parvenu à l'âge de 40 ans, sous peine d'être promis à la mort, se caractérise surtout, à ce moment, par ses célèbres cuites, son attachement à des

personnages visiblement douteux, sa gestion chaotique. (...)

Ses amis politiques le lâchent un à un. (...) Tous l'abandonnent réellement quand se déchaîne la première tornade judiciaire et médiatique.

A la fin de 1991, Guy Spitaels fait entrer Mathot au gouvernement wallon. Van der Biest, qui a participé aux négociations, est écarté. On apprendra, il est vrai, qu'il a déclaré à la juge Ancia que le PS percevait des

commissions sur de nombreux marchés publics wallons... (...)

On se souvient depuis lors des images d'un homme frêle, titubant et, déjà, marqué, répondant laconiquement à des interviews devant le palais de Justice de Liège et réapparaissant, livide et seul, à la Chambre pour voter les accords institutionnels de la Saint-Michel. En mars 1993, il frôle la mort lors d'une chute aussi célèbre que mystérieuse : double fracture du crâne.

Il ne parle plus de livres ou de politique. Mais seulement de lui. De ses «neuvaines», de son alcoolisme, de ses insomnies.

En juillet dernier, interrogé par « Télé Moustique», Van der Biest résumait avec réalisme sa situation, fruit de cinq ans de démêlés : Je ne suis plus rien.

Article paru le 9 septembre

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Fêtes en prison pour Van der Biest

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 7

Les proches d'Alain Van der Biest disent ne pas comprendre les raisons pour lesquelles sa détention se prolonge. Sans doute par facilité, suggère son épouse en rappelant qu'il a à peine été interrogé par la cellule Cools depuis son arrestation au début de septembre. La prochaine chambre des mises le maintiendra-t-il en prison?

Photo Belga.

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Di Rupo: une affaire de moeurs... policières

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 7

De manière irrépressible, les tragiques découvertes du mois d'août enfoncent la Belgique dans un marais de délation et de soupçon.

La rumeur se répand dans chaque interstice de l'enquête sur les réseaux de pédophilie. Au point d'emmêler le vrai et le faux.

Et quelques jours avant de se voir démis du dossier Dutroux par la Cour de cassation, le juge Jean-Marc Connerotte décide d'ouvrir une ligne verte destinée à recueillir des témoignages. Elle s'avérera vite une arme judiciaire à double tranchant...

Dans ce décor désenchanteur, qui voit s'effondrer les convictions d'une société s'imaginant à l'abri de telles horreurs, les conditions sont réunies pour favoriser l'éclosion d'accusations fantaisistes ou orientées. Au risque d'ébranler l'édifice institutionnel d'un pays déjà éreinté par les « affaires » en cours.

C'est dans ce terreau propice aux manipulations en tout genre que peuvent éclore les dossiers «croustillants » du vice-Premier ministre Di Rupo et du ministre régional Grafé.

Au terme d'une enquête menée à la hâte, et dont on découvrira rapidement qu'elle contient tous les ingrédients d'une machination politico-judiciaire, la chambre des représentants reçoit des mains du procureur général de Bruxelles André Van Oudenhove un premier dossier mettant en cause le chef de file des francophones au gouvernement fédéral. Accusé de pédophilie par un témoin aux déclarations très changeantes, Di Rupo devient la cible privilégiée d'une cabale hallucinante.

Respectueuse de la loi concernant la responsabilité pénale d'un ministre, la chambre désigne aussitôt une commission d'enquête parlementaire, - laquelle confie à la Cour de cassation la difficile mission d'enquêter sur les déclarations «spontanées» du témoin principal, Olivier Trusgnach.

Quatre semaines plus tard, le conseiller Fischer, cornaqué par Eliane Liekendael, procureur général près la Cour de cassation, dépose un rapport de 1.300 pages à la Chambre. Les magistrats affirment n'avoir aucun élément de preuve permettant d'étayer la thèse de Trusgnach. Di Rupo est blanchi. Mais entre-temps, deux dossiers du même tonneau (un fatras de ragots) atterrissent sur la table du procureur général de Bruxelles pour rebondir quelques heures plus tard au centre du parlement. Le carrousel de la délation est lancé. Rien ne semble pouvoir l'arrêter.

A la hâte, les députés adoptent une loi temporaire destinée à enrayer le cycle infernal des accusations portées à l'encontre d'un ministre. Il est vrai qu'en ayant choisi de respecter à la lettre les procédures (transmission immédiate du dossier à la Chambre dès que le nom d'un ministre est évoqué), la justice n'a rien fait d'autre qu'alimenter la pompe aux rumeurs. Par cette nouvelle loi (attendue depuis 165 ans), il sera désormais permis à la Cour de cassation d'indaguer en profondeur avant de demander à la chambre de se prononcer sur une éventuelle mise en accusation.

Sale temps pour les corbeaux...

Pour qui douterait encore de la manière effrayante avec laquelle le pouvoir judiciaire et/ou policier a monté ce dossier, nous ne pouvons que renvoyer à la lecture que nous avons faites des pièces qui le constituent

(«Le Soir» du 24 décembre).

Silences, mensonges, fuites et manipulations transpirent à chaque page de ce monument dédié à l'incroyable.

Restent les questions. Graves et angoissantes. Pourquoi cette machination a-t elle été orchestrée? Qui a provoqué les fuites?

Qui a poussé Trusgnach à adapter ses déclarations? Aux enquêtes sur l'enquête de faire rapidement la lumière sur cette affaire de moeurs... policières.

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1997, une année de défis

« Le Soir » du samedi 28 décembre 1996 page 7

L'année 1997 va s'ouvrir sur une série de points d'interrogation et de défis à relever.

L'enquête.

Malgré une discrétion apparente, elle se poursuit au pas de charge sous la direction du juge Langlois et du procureur Michel Bourlet. Ces derniers jours ont vu l'émergence d'une piste sataniste. Les clients du réseau Dutroux n'ont toujours pas été identifiés.

Les fouilles sont appelées à se poursuivre. Les moyens colossaux nécessités par l'enquête se devront d'être maintenus à un niveau suffisant.

Car c'est bien évidemment l'aboutissement de l'enquête qui signifiera pour l'opinion publique que « toute la vérité n’a pas été faite. »

La commission d'enquête parlementaire.

Elle a suspendu ses travaux alors qu'à la veille de la trêve de Noël, elle venait de procéder à une dramatique confrontation entre la juge d'instruction Doutrèwe et l'adjudant Lesage, de la BSR de Seraing. L'un(e) ou l'autre ment. A la reprise de ses auditions, le 6 janvier, la commission pourrait convoquer le général Derider, patron de la gendarmerie.

En principe, la commission, qui disposait d'un mandat de trois mois, devrait terminer ses travaux le 17 janvier. Mais l'examen du dossier «Julie et Mélissa» devrait encore la mobiliser pendant au moins deux semaines. Et il faudra encore traiter de l'enquête menée sur les disparitions d'An et Eefje. La commission devrait donc demander au parlement une prolongation de son mandat.

Justice.

Le conseil des ministres du 20 décembre a reporté au 10 janvier la décision de créer un «conseil supérieur de la Justice», présenté comme la clef de voûte de la réforme souhaitée pour l'appareil judiciaire. Ce conseil aura notamment en charge la formation et la promotion des magistrats. Mais cette institution nouvelle pourrat-elle donner à la Justice le visage humain réclamé à cor et à cri par l'opinion?

Police-gendarmerie.

Syndicats et hiérarchie de la police judiciaire et de la gendarmerie ont officiellement annoncé la fin des hostilités dans la guerre larvée qui oppose les deux corps sur la répartition des enquêtes.

L'idée de mettre sur pied une «police fédérale unique a été lancée. Et le parlement, à la lumière des errements dans l'enquête «Julie et Métissa devrait s'intéresser au contrôle des activités de la gendarmerie, qualifiée de véritable «état dans l'État ».

Comités blancs.

Le discours royal prononcé à la veille de Noël a donné sa légitimité au « mouvement blanc ».

Le mouvement populaire spontané, né le 20 octobre dans les rues de Bruxelles, semble appelé à se structurer et à devenir, sans doute, un nouvel interlocuteur dont les idéaux devront être pris en compte par les partis traditionnels.

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Légendes des photos des prévenus dans l’affaire Cools : (De gauche à droite)

Todarello : l'homme des révélations.

Photo B. Devoghel.

Taxquet nie être l'homme orchestre.

Photo Guissard.

Pino Di Mauro a-t-il fourni des armes?

Photo Belga.

Solazzo, un des chefs selon les Tunisiens.

Photo Belga.

«Mimo» Castellino a évacué les tueurs.

Photo Belga.

lachino Contrino effectuait les repérages.

Photo gelga.

Jelil faisait le guet à Cointe, prêt à tirer,

Photo EPA.

Majid, le tueur reconnu par M .Hélène Joiret.

Photo EPA.

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