Enquête à l’américaine( «Le Vif l’express» 25 octobre 1996 pg 16 à 17)
Enquête à l’américaine
> Marie-Cécile Royen
Pourtant, Reynders n'a pas tout à fait tort. Si les travaux de la commission d'enquête sont à l'image de ce qu'on a déjà vu et entendu à
justice-gendarmerie, qui éclipsera l'« enquête sur l'enquête ». Et dédouanera le gouvernement de ses responsabilités politiques, que Reynders souligne à grands traits rageurs « La majorité actuelle est en place depuis neuf ans, elle aurait déjà eu tout le temps de réformer la justice et les services de police. »
Pourquoi, enfin, Martine Doutrèwe, juge d'instruction liégeoise, a-t-elle lancé tardivement ses premiers devoirs d'enquête ?
Jusqu'à présent, cette dernière, tenue par le devoir de réserve, n'a pas répondu aux attaques, parfois en dessous de la ceinture, dont elle a fait l'objet de la part du comité P, la police des polices ». La gendarmerie, elle, s'est amnistiée du reproche de rétention d'information formulé par Anne Thily, procureur général de Liège. Laquelle a « expédié » en quelques lignes le déroulement de l'enquête à Liège.
Quant a Jacques Velu, dont le rapport doit encore être complété par celui d'Eliane Liekendael, qui lui a succédé comme procureur général de
Bref,
Le travail des parlementaires n'est pas simple. Jusqu'à présent, ils n'avaient pu consulter ces rapports que dans des conditions totalement absurdes (quelques heures par jour, sous la surveillance d'un fonctionnaire). Aujourd'hui, ils doivent très rapidement en dresser un tableau synoptique, y déceler les incohérences, les contradictions et les lacunes, réinterroger les protagonistes et faire monter » de nouveaux témoins. Il y aura du travail tandis que l'enquête sur la disparition de Julie et de Mélissa patinait, le « milieu » carolo bruissait de rumeurs à propos de Dutroux, dont au moins un gendarme a été averti à plusieurs reprises. Cela ne figure dans aucun rapport.
Il serait souhaitable de se doter d'une législation sur les repentis, soutient Didier Reynders, pour que des personnes qui s'exprimeraient sans l'aval de leur hiérarchie ne puissent pas être sanctionnées. »
Une précaution qui ne sera pas inutile : en effet, un officier de gendarmerie, membre du BCR (Bureau central de recherches), a déjà été muté et voit sa carrière compromise depuis qu'il a pris des contacts extérieurs pour dénoncer le fonctionnement de ce service.
Mais, en attendant, Vincent Decroly suggère qu'on fasse appel à la technique qui a déjà été utilisée, dans l'affaire Agusta, pour protéger un témoin anonyme » qui s'est révélé être, par la suite, Philippe Moureaux.
Un haut magistrat, en l'occurrence Francis Fischer, conseiller à
Que faut-il attendre de cette commission d'enquête, alors que le Premier ministre a annoncé une batterie de mesures correctives et défini un calendrier serré, en même temps qu'il annonçait d'ores et déjà des sanctions (lire ci-contre) ? Son champ d'action est vaste : mettre au jour les dysfonctionnements dont tout le monde se doute et qui avaient déjà été dénoncés lors des précédentes enquêtes parlementaires sur les tueries du Brabant wallon et la traite des êtres humains, relever les fautes professionnelles commises par des magistrats ou des enquêteurs dans l'exercice de leur métier et révéler les « protections » dont auraient joui les criminels et qui seraient susceptibles de faire l'objet de poursuites pénales. Les chamailleries du début seront vite oubliées si les parlementaires sont aussi incisifs qu'ils l'ont promis.
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Les quatre promesses
2_ Sanctionner les fautes commises. Mais celles-ci doivent d'abord être identifiées : c'est le travail de l'« enquête sur l'enquête ». Celle-ci se déroule au Parlement, mais également dans les cabinets des ministres de la justice et de l'Intérieur qui se livrent à leurs propres analyses sur la base des rapports déjà remis. Question : qui tirera le premier ? Les réponses sont encore floues. Elles dépendent, en grande partie, de la nervosité de l'opinion publique. Après le succès pacifique de la « marche blanche », la nécessité de faire « tomber des têtes » n'a peut-être plus le même caractère d'urgence. Les sanctions les plus graves - destitution d'un magistrat, démission d'office pour un membre de
3_ Réviser l'article 151 de
4_ Réunir, avant la fin de l'année (et au plus tard début décembre) des ministres qui débattront au finish d'une série de réformes relatives à la justice : accès des victimes au dossier répressif, création de tribunaux d'exécution des peines et adaptation de la loi relative à la libération conditionnelle.
Ce « spécial justice » décidera également des modalités de l'installation, à Bruxelles, d'une réplique européenne du « Center for Missing and Exploited Children », d'Arlington (Virginie).
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