dimanche 14 décembre 2008

Ecoeurement et révolte populaire après le dessaisissement du juge Connerotte («CinéRevue» 17 octobre 1996)


Ecoeurement et révolte populaire après le dessaisissement du juge Connerotte

 

« UNE » de « Ciné Télé Revue »  du jeudi 17 octobre 1996

 

Les Belges peuvent-ils encore avoir confiance en la justice et en l'État

 

LES REBONDISSEMENTS DE L'ENQUÊTE DUTROUX :

 

Trois corps sont cachés à Jumet

 

EXCLUSIF « Je sais ce qu'il y a sur certaines cassettes »

_________________________

Le texte intégral de l’arrêt de la Cour de cassation dessaisissant le Juge Connerotte

(14 octobre 1996)

La Cour, Ouï M. le conseiller Willems en son rapport et sur les conclusions de Mme Liekendael, procureur général;

Vu la requête en dessaisissement en renvoi pour cause de suspicion légitime et son mémoire ampliatif, déposés au greffe de la Cour les 26 septembre et 3 octobre 1996 et annexés au présent arrêt, en copie certifiée conforme, par lesquels le requérant demande que le juge d'instruction Jean-Marc Connerotte soit dessaisi des dossiers de Sabine Dardenne, Laetitia Delhez, Julie Lejeune, Melissa Russo, An Marchal, Eefje Lambrecks, Bernard Weinstein et tous autres, tel le dossier dit de trafic de voitures volées faisant au cabinet de ce magistrat l'objet d'une instruction à charge du demandeur et que ces causes soient renvoyées à un autre juge d'instruction;

Attendu que, sur base d'articles de presse, le requérant invoque à l'appui de sa requête, notamment les faits suivants:

1. L'antenne bertrigeoise de l'ASBL Marc et Corine a organisé le samedi 21 septembre 1996 une soirée avec repas réunissant environ 400 personnes, dont le bénéfice devait être affecté notamment aux frais de défense en justice de Laetitia Delhez; que celle-ci, Sabine Dardenne et leurs parents y étaient conviés;

2. Le juge d'instruction Jean-Marc Connerotte a été, en cette circonstance, l'hôte de cette ASBL en compagnie du procureur du Roi, partie poursuivante;

3. Les photos illustrant les articles cités confirment cette présence;

4. Un présent a été remis au juge d'instruction;

Attendu que l'impartialité des juges est une règle fondamentale de l'organisation judiciaire;

qu'elle constitue, avec le principe de l'indépendance des juges à l'égard des autres pouvoirs, le fondement même non seulement des dispositions constitutionnelles qui règlent l'existence du pouvoir judiciaire mais de tout Etat démocratique; que les justiciables y trouvent la garantie que les juges appliqueront la loi de manière égale;

Attendu que la condition essentielle de l'impartialité du juge d'instruction est son indépendance totale à l'égard des parties, en manière telle qu'il ne puisse s'exposer au soupçon de partialité dans l'instruction des faits, que ce soit à charge ou à décharge; que le juge d'instruction ne cesse à aucun moment d'être un juge ne pouvant susciter dans l'esprit des parties ou dans l'opinion générale une apparence de partialité; qu'aucune circonstance, fût-elle exceptionnelle, ne le dispense de ce devoir;

Attendu que la Cour apprécie la pertinence des motifs invoqués à l'appui d'une demande de renvoi pour cause de suspicion légitime à la lumière de ces principes et des dispositions légales qui les consacrent;

Attendu qu'ainsi il résulte du rapprochement de l'article 828 du Code judiciaire, qui énumère les causes de récusation, et de l'article 542 du Code d'instruction criminelle, qui prévoit le renvoi d'un tribunal à un autre tribunal pour cause de suspicion légitime, que le juge d'instruction qui a été reçu par une partie à ses frais ou qui a agréé d'elle des présents, et a manifesté de la sorte sa sympathie à l'égard de cette partie, se met dans l'impossibilité d'instruire la cause de celle-ci, sans susciter chez les autres parties, notamment les inculpés et les tiers une suspicion à son aptitude à remplir sa mission d'une manière objective et impartiale;

Attendu qu'il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard et notamment des rapports adressés par le procureur du Roi à Neufchâteau au procureur général près la cour d'appel de Liège et déposés au dossier par le procureur général près la Cour, que les faits ci-dessus énoncés sont avérés et pertinents, et que, de surcroît, le juge Connerotte avait reçu en ses mains une constitution de partie civile de l'ASBL Marc et Corine contre le requérant;

Attendu qu'il y a lieu de dessaisir sur-le-champ ce juge d'instruction des dossiers concernant ledit requérant;

Attendu que, par ailleurs, la nécessité de poursuivre l'instruction sans désemparer ainsi que l'ampleur des moyens déployés sur place par les enquêteurs commandent le renvoi de la cause à un juge d'instruction du même arrondissement;

qu'il appartiendra au président du tribunal de première instance de Neufchâteau, conformément à l'article 80, alinéa premier, du Code judiciaire, de désigner un juge effectif pour remplacer le juge d'instruction désigné par le Roi, désormais empêché;

 

Par ces motifs,

Dessaisit le juge d'instruction Connerotte de la connaissance des dossiers 86/96 (Dutroux et Nihoul) et 87/96 (trafic de voitures) ouverts à charge du requérant ainsi que de tout dossier joint en raison de la connexité:

Ordonne le renvoi de ces dossiers à un autre juge d'instruction du tribunal de première instance de Neufchâteau. 

Ainsi prononcé, en audience publique le 14 octobre 1996, par la Cour de cassation, deuxième chambre, séant à Bruxelles, où sont présents M. Stranard, premier président, présidant, M. D'Haenens, président, M. Marchal, président de section, M. Willems et Mme Jeanmart, conseillers, Mme Liekendael, procureur général, Mme Pigeolet, greffier.

 

 

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