jeudi 25 septembre 2008

Une maman au combat(pg39)--Weinstein(pg38) («Soir Illustré» 11 septembre 1996)


Une maman au combat

 « Le Soir Illustré » du mercredi 11 septembre 1996 pages 39

Dans la déferlante de mauvaises nouvelles qui accablent la Belgique, la maman d'Élisabeth Brichet conserve une attitude à la fois digne et volontaire, à l'image des autres parents eux aussi étonnants de maîtrise. Après sept ans d'épreuves, elle se dit que l'heure de la vérité va peut-être sonner, en craignant le pire.

Sur son répondeur, elle se présente simplement comme la maman d' Élisabeth Brichet. Une voix douce demande de laisser un message, preuve du souci de ne négliger aucun contact. Marie Noëlle Bouzet est plus connue comme la maman de la petite Namuroise disparue le 20 décembre 1989, à quelques mètres de chez elle, près de Saint-Servais.

Elle revenait de chez une amie habitant à deux pas, elle avait 12 ans, on ne l'a plus jamais revue. Plus encore que pour d'autres, l'affaire Dutroux a de cruelles résonances chez cette femme éplorée. Elle a fait renaître l'angoisse en même temps que le besoin de savoir, d' enfin accéder à une solution, aussi funeste soit-elle. Mme Bouzet fait partie de ces oubliés de la Justice, livres quasiment à eux mêmes, à la recherche d'un fantôme. Elle espère que, des décombres du dossier, surgira un indice décisif sur sa petite fille. En sept ans, elle a essuyé bien des déceptions, des commissions rogatoires aux Canaries aux enquêtes en Espagne, en passant par de nombreuses fausses pistes.

Récemment, un couple de Dinantais prétendait même avoir vu Elisabeth en septembre 95 dans un café des Pyrénées françaises, à Bagnères-de-Bigorre, où des jeunes filles se prostituent. A chaque fois, le coeur des parents (aujourd'hui séparés) s'emballe pour sombrer dans une nouvelle incertitude. Mais la maman d'Elisabeth ne relâche pas sa vigilance. Elle se dit persuadée de l'existence d'un lien entre la disparition de sa fille et Dutroux. Elle clame depuis longtemps que des réseaux de pédophiles sévissent en Belgique, scénario aujourd'hui tristement confirmé.

ÉVACUER L'ANGOISSE

Elle doit supporter l'idée que, si elle retrouve son enfant, ce sera peut-être pour en porter le deuil. Mais à ses yeux, rien n'est plus insupportable que l'ignorance. C'est pour cette raison qu'elle s' est rendue spontanément à Jumet la semaine dernière. La maman se bat avec toute son énergie, en surmontant le chagrin.

Elle est très digne, Mme Bouzet. Elle a trouvé les mots justes aux obsèques de Julie et Mélissa. Son intervention a rappelé le chemin de croix des parents, l'incrédulité sur laquelle ils butaient jusqu'à ce qu'on découvre l'inimaginable. Elle a récidivé sur le plateau de Perdu de Vue, à TF 1, face à Jacques Pradel, expliquant le sens d'un entêtement qui honore tous les parents en proie à l'absence.

Elle a rencontré le Roi pour dialoguer avec lui. Elle a même souhaité être accompagnée par son ex mari, Francis Brichet. Usé par tant d'années de combat, celui-ci a décliné l'offre.

- J'attends ma fille depuis sept ans, mais ce sont les dernières semaines qui m'ont le plus remué, a-t-il avoué à un quotidien flamand. D'abord, la découverte de Julie et Melissa, puis celle d'An et Eefje. Je suis sonné. J'espère qu'Élisabeth est morte depuis longtemps, qu'elle n'a pas dû se prostituer depuis sept ans. Je préférerais qu'on la retrouve sous terre...

Ce terrible aveu d'un père désabusé s'explique par l'épais brouillard entourant l'enquête.

- Le grand scandale de tout cela tient au secret de l'instruction.

Nous, les parents qui avons perdu un enfant, nous ne pouvons pas savoir où en est l'enquête, ce qu'on fait pour les retrouver. On se heurte à un silence persistant, qui accroit encore notre peine...

M. Brichet a tout enduré pendant sept ans. Il a vérifié tout ce qu'il pouvait. La maman, elle, continue sans relâche. A la recherche d'un soulagement quel qu'il soit.

B.M.

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Weinstein : itinéraire d’un voyou

« Le Soir Illustré » du mercredi 11 septembre 1996 pages 38

 De Nantes à la banlieue parisienne, le parcours d'un petit voyou, condamné devant la cour d'assises du Val d'Oise pour quelques jours de coups foireux, d'errance calamiteuse.

Samedi 17 août, vers 20 heures, les hommes de la protection civile de Ghlin qui viennent d'exhumer les corps de Julie Lejeune et de Mélissa Russo, mettent à jour une nouvelle dépouille, celle de Bernard Weinstein, le propriétaire de la maison et du terrain de Sars-la-buissière que les enquêteurs sont en train de fouiller. Cet homme que Dutroux aurait enterré vivant après l'avoir drogué, avait connu dans ce coin de campagne du Hainaut l'épilogue d'une vie de sans-grade de la voyoucratie.

• Bernard Weinstein est né à Nantes le 4 mars 1952, il quitta sa Bretagne natale pour "zoner" à Paris. En fait, c'est en banlieue qu'il commettra les misérables exploits qui lui vaudront de se retrouver devant la cour d'assises du Val d'Oise en février 1981.

•Cela faisait déjà six ans que Weinstein attendait en prison que l'on rappelle devant un jury les lamentables journées de décembre 1975 où il avait couru de cambriolages calamiteux en braquages foireux. A cette époque-là, Weinstein "travaillait" avec Patrick Dubouille. Les deux hommes s'étaient spécialisés dans la voiture volée, espérant rejoindre la route des grands trafics.

• Le 19 décembre 1975, à Osny, Weinstein et Dubouille tentent de voler une voiture au garage Rousseau, le concessionnaire Citroën de la localité. Les deux voyous sont armés, mais finissent par s'enfuir sans avoir réussi à faire démarrer le véhicule qu'ils convoitaient.

• Weinstein, se rend alors au magasin Vivre, que tient Mme Bachetta et réussit à dérober... 20 FF sous la menace de son arme. Le lendemain, une rude journée attend Dubouille et Weinstein. L'arrêt de renvoi devant la cour d'assises précise, qu'à Bethemont, ils ont séquestré un certain Philippe Lévêque, le menaçant de mort.

• Ils se sont rendus ensuite à StOuen-l' Aumone, au garage Pontoise-Motors, où ils ont volé "500ff, un attaché case, deux pistolets à peinture et deux automobiles Fiat".

Quelques heures plus tard, ils volent une autre voiture où trois personnes ont pris place. Weinstein et Dubouille, comme à leur habitude, sont armés. Dubouille tire et blesse l'un des occupants de la voiture.

• Aprés deux jours de repos, le 23 décembre, le duo reprend ses activités et vole de nouveau une voiture en menaçant ses occupants.

Cette fois encore Dubouille tire et blesse légèrement un passager. Le 27 décembre, à Toste, dans le département de l'Eure, Weinstein toujours armé, tente de voler une 2CV camionnette. Aprés cette dernière tentative, les policiers du Val d'Oise qui étaient sur la piste des deux voyoux, les arrêtent. Ils sont placés sous mandat de dépôt.

• Le 27 février 1981, Weinstein est condamné à 15 ans de réclusion criminelle et Dubouille à 20 ans.

• Weinstein sortira en 1985, après avoir effectué neuf années de prison et bénéficié des remises de peines habituelles. En prison Weinstein s'était, semble-t-il, fait de nouvelles relations; à sa sortie il continua dans ce dont il allait faire sa spécialité, le trafic de voitures. La filière passait par la Belgique, Weinstein se retrouva naturellement à Charleroi.

 Alain Van Der Eecken.

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LES PARENTS DE LOUBNA BENAISSA: NOTRE FILLE EST VIVANTE

 « Le Soir Illustré » du mercredi 11 septembre 1996 pages 38 et 39

 Les nerfs sont à vif au sein de la famille Benaïssa à Ixelles,

 (Bruxelles). Jeudi dernier, vers 14 h 30, les parents et la sueur aînée de la petite Loubna, disparue, rappelons-le en 1992, étaient reçus par les Souverains belges. Près d'une demi-heure d'entretien, de réconfort qui a donné bien du baume au coeur de la famille marocaine. "Le Roi et la Reine nous ont posé beaucoup de questions et attentivement écoutés, souligne Nabela Benaïssa, la fille aînée. Nous avions le profond sentiment qu'ils comprenaient notre désespoir et qu'ils étaient véritablement de notre côté".

L'émotion, plus tragique cette était à son comble, toujours jeudi dernier. En effet, d'importantes fouilles avaient été entreprises dans une maison sise à la rue du Conseil à Ixelles, à quelques trois cents mètres du domicile des Benaïssa. La famille apprend cette nouvelle avec effarement : "Nous avons peur, très peur d'apprendre une terrible nouvelle. A chaque coup de fil, et ils sont nombreux, nous sursautons. Nous avons l'impression de revivre les terribles moments d'angoisse et de panique d'il y a quatre ans, au moment de la disparition de Loubna".

Les traits tirés, la voix nouée d'émotion, les parents de Loubna attendent. Une attente permanente qu'ils supportent de moins en moins. "Je me suis déjà rendu plusieurs fois à la rue du Conseil, confie le père de Loubna. J'espère y trouver ou apprendre quelque chose. Je ne supporte plus d'attendre chez moi alors que des fouilles ont lieu dans le quartier".

Contre toute attente, la famille Benaïssa garde l'espoir. Elle dit avoir confiance dans la justice belge. Elle se sent moins seule, mieux comprise depuis que témoignages écrits et téléphoniques lui parviennent par dizaines. L'asbl L'asbl "Marc et Corine" reste en contact permanent. Enfin, la gendarmerie rend régulièrement visite aux parents Benaïssa.

"Nous sommes tenus au courant de l'évolution de l'enquête. Les fouilles ont été interrompues le week-end dernier afin que l'architecte puisse vérifier la construction de la maison. On nous a certifié que les recherches seront menées jusqu'au bout. Le mur du silence est brisé. Tout bouge enfin".

 Samedi, les parents Benaïssa étaient présents aux funérailles d'An et d'Eefe. "Nous nous sentons très proches des parents.

Même si nous ne les connaissons pas, leur parcours ressemble au nôtre. D'ailleurs, notre souhait est de pouvoir réunir toutes les familles d'enfants disparus. Nous devons nous soutenir ensemble, dans la solidarité".

Corinne Le Brun.

 

 

 

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