dimanche 27 juillet 2008

l'exploitation sexuelle des enfants('La Wallonie'29 août 1996 p7)



Commentaire :Esclavage

«La Wallonie» du jeudi 29 août 1996 page 7

La conférence sur l'exploitation sexuelle des enfants, ouverte mardi à Stockholm, sera peut-être moins académique et moins ronronnante après les tragiques événements qui ont mis la Belgique au centre de l'actualité criminelle mondiale. Pourtant, des ONG soucieuses de porter réellement le fer dans la plaie y côtoient des ministres et des fonctionnaires préoccupés d'abord par la bonne réputation de leur gouvernement.

Rappelons que !a conférence est organisée par l'UNICEF (fonds des Nations-Unies pour l'enfance) en coopération avec /e gouvernement suédois. Cent vingt-six pays y participent.
Ce n'est pas trop, car le mal est mondial. Certes, les chiffres les plus accusateurs sur l'esclavage sexuel placent toujours en tête des pays comme les Philippines (650.000 ?) ou la Thaïlande (200.000 ?), mais la Chine, l’Inde, l'ensemble du Sud-est asiatique, l'Europe orientale, le Moyen-Orient, l'Amérique latine, offrent aux trafiquants des conditions qui, dit-on, se feraient moins favorables à Manille et à Bangkok.
Et, tandis que Dole et Clinton célèbrent «la famille», l'exploitation sexuelle des enfants sévit massivement aux Etats-Unis.
Tout est lié, tout est dans tout, il y a l'esclavage sexuel et l'enfance esclave du travail, phénomène qui à lui seul suffit à justifier ce qu'on appelle la clause sociale. Mais les congressistes de Stockholm ne peuvent que cerner le dernier cercle de l'enfer en évitant le débat global sur la prostitution : il s'agit ici du trafic des êtres humains les plus faibles et les plus vulnérables par définition. Comment réduire l'ignoble tourisme sexuel ? Comment, dans ce monde où tout s'achète et tout se vend, faire de la vidéo cassette pornographique mettant en scène des enfants un tel sujet de répulsion que l'action répressive en sera facilitée ? Qu'aucune autorité publique, nulle part, ne pourra plus s'autoriser l'indifférence ? Citons ici un rapport qui rétrospectivement montre qu'«on savait», indiquant «un marché clandestin, très mouvant, très souple, mais florissant, et qui répond à une demande croissante (Europe, USA et Japon en tête) provenant essentiellement mais non exclusivement des milieux de la pédophilie» (1).

Mais tout est lié, et certainement les trafics de la drogue et le commerce des êtres humains. Si la nouvelle criminalité planétaire, qui a explosé depuis !a chute du mur de Berlin, n'est pas frappée dans ses intérêts directs - c'est à dire ses comptes bancaires, leur origine, leurs mouvements - alors Stockholm restera au niveau des bonnes intentions.

Robert Falony

(1) Fondation Roi Baudouin, «Prostitution et exploitation sexuelle», 1991.

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CONGRES MONDIAL CONTRE L'EXPLOITATION DES ENFANTS À STOCKHOLM

Le ministre Erik Derycke en appelle à une répression mondiale

«La Wallonie» du jeudi 29 août 1996 page 7

Le discours du ministre belge des Affaires étrangères, Erik Derycke, était particulièrement attendu par les participants au congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants, qui ont les yeux braqués sur
la Belgique et lés développements de l'enquête sur les agissements de Marc Dutroux et ses complices.

M. Derycke a souligné, mercredi à Stockholm, le caractère planétaire de l'exploitation sexuelle commerciale des enfants et plaidé pour une action urgente et solidaire, sous la forme de l'élaboration d'un système répressif mondial s'appliquant à ce type de crimes. Une tâche à laquelle la Belgique doit apporter sa contribution.
"Nous vivons tous aujourd'hui en Belgique dans l'ombre de l'infamie et de l'horreur", a affirmé M.Derycke au cours de son allocution, mettant l'accent sur la barbarie mise à jour petit à petit depuis l'ouverture du dossier Dutroux.
"Cette affaire dramatique a révélé en Belgique et en Europe c e terrible mal que notre conférence est appelée non seulement à dénoncer mais à combattre".
Pour le ministre des Affaires étrangères, l'arsenal législatif "remodelé en 95" dont dispose la Belgique pour combattre les crimes sexuels visant des enfants n'est pas suffisant. Selon M. Derycke, ce type de criminalité doit en effet être combattu au niveau planétaire. "Le phénomène que nous combattons est un symptôme de ce mal qui accable les sociétés modernes: l'homme est devenu objet commercial plutôt que sujet de droit".
L'apport de la Belgique dans la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants a été souligné par le ministre. Une des priorités de la politique belge reste le suivi du Traité des Nations Unies sur les droits de l'Enfant.
Une conférence interministérielle chargée de mettre en oeuvre les obligations prises par la Belgique dans le cadre de ce Traité aura lieu en septembre.
Une meilleure coopération judiciaire
En ce qui concerne la traite des êtres humains "dont le trafic d'enfants", M. Derycke a déclaré que la Belgique introduirait avant la fin de l'année une proposition d'action commune dans le cadre du troisième pilier du Traité de Maastricht. "L'instrument nouveau que nous proposerons visera à améliorer la coopération judiciaire en matière de répression de la traite des personnes humaines et s'articulera à travers des mécanismes de coopération internationale et une raionalisation des mécanismes nationaux déjà existants, a-t-il précisé.
Toujours au niveau européen,M. Derycke a également noté l'importance de la ratification rapide par tous les membres de l'Union de la convention Europol établie pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants.
Afin que sa mise en oeuvre soit réalisée sans délai et sans réserves.
Tous les droits de l'enfant
Mais si l'exploitation sexuelle des enfants est une expression extrême de l'injustice et de la manière dont la société se conduit à l'égard des enfants, M. Derycke a observé qu'il fallait également se pencher sur les droits des enfants en général: droits économiques, sociaux, culturels, ainsi que politiques et civils.
Mais si l'actualité focalise actuellement l'attention sur la Belgique, elle ne doit pas occulter la réalité quotidienne des pays envoie de développement. Une réalité désarmante puisque plus d'un million d'enfants de part le monde sont abusés sexuellement.
La pauvreté est un terrain propice à l'exploitation sexuelle des enfants. "Le degré d e protection qu'une famille peut offrir matériellement diffère des situations socio-économiques des différentes régions de par le monde. Ce clivage socio-économique fait que trop de familles ont vu leurs en fants devenir victime de ces prati
ques dans l'indifférence complice des autorités locales et des pays riches. Ce scandale ne cessera que grâce à une action concertée des pays donateurs et des pays bénéficiaires de l'aide au développement. L'expérience de coopération d e la Belgique dans ce domaine, nous démontre l'intérêt mutuel d'une telle approche", a expliqué M. Derycke.
En conclusion, le ministre a insisté sur la nécessité d'élaborer, surtout à travers une coopération et une solidarité multilatérale réelle la mise en oeuvre d'un système répressif mondial s'appliquant aux crimes sexuels contre des enfants. Un tel sujet trouve, selon lui, sa place dans les négociations en cours à New York sur la création d'une cour criminelle internationale.
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MINISTRE DERYCKE

«Appliquer concrètement lois et règlements»


«La Wallonie» du jeudi 29 août 1996 page 7

Placé, un peu malgré lui, par l'actualité, face aux caméras de la presse internationale, le ministre belge des Affaires étrangères Erik Derycke a réaffirmé mercredi la nécessité de voir chaque pays mettre en oeuvre des mesures pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants.

« Beaucoup de traités et de lois sont signés mais leur application est ensuite une deuxième obligation que chaque pays doit remplir », a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Stockholm, où il venait de prendre la parole devant le congrès mondial sur l'exploitation sexuelle des enfants.

Le dramatique faits divers qui ébranle la Belgique actuellement nous amène à la triste constatation que même dans un pays d'Europe occidentale, de tels drames peuvent se produire. "Mais il ne faut pas jeter un regard égocentrique sur le problème, qui est mondial. Ce qui s'est passé en Belgique ou en Grande Bretagne
(Référence à l'affaire West, "la maison de l'horreur") se passe dans le monde entisr", a déclaré M. Derycke.
Pour le ministre des Affaires étrangères, l'exploitation sexuelle des enfants n'est rien d'autre que l'expression extrême d'un système socio-économique ultra-libéral où l'on peut acheter "même le corps d'un enfant" .
La Belgique est à la pointe de mesures contre les abus sexuels visant des enfants, a rappelé le ministre .
Elle est notamment un des premiers pays au monde à avoir inscrit dans sa législation le principe d'extra-territorialité. Ce principe permet d'ores et déjà de poursuivre en Belgique toute personne, belge ou étrangère, coupable d'infractions sexuelles commises à l'étranger à l'égard de mineurs de moins de 16 ans.
L'ordre a par ailleurs été donné à toutes les représentations diplomatiques belges de faire suivre tous les dossiers d'abus sexuels d'enfants commis à l'étranger.

M. Derycke a enfin rappelé pour la presse étrangère que son collègue de la Justice, Stefaan De Clerck, avait présenté récemment plusieurs mesures pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants, qu'il soumettra d'ailleurs vendredi au conseil des ministres.
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INTERNET
Le visage "Hi tech" de la pornographie


«La Wallonie» du jeudi 29 août 1996 page 7

Un million d'images pornographiques et 40 millions de pages Internet sont actuellement consacrées à la pornographie enfantine, estiment les experts présents au congrès d e Stockholm sur l'exploitation sexuelle des enfants.

Internet a fait exploser le marché de la pornographie, avec "une quantité énorme des images les plus dégoûtantes" qui soient, explique Werner Nowak, spécialiste consultant du mouvement ECPAT (End Child Prostitution in Asian Tourism) à Bangkok. On y propose "des enfants torturés, violés, forcés d'avoir des relations sexuelles avec des animaux".

Et pour le moment, « on utilise surtout des garçons », sans que l'on sache encore vraiment pourquoi, précise-t-il. En mettant à profit les dernières technologies, entremetteurs, clubs de pédophiles et amateurs de pornographie ont atteint une vitesse et une qualité de diffusion jamais égalées jusqu'à présent: la transmission ne prend que quelques secondes, les images digitalisées sont reproduites à l'infini, sans que leur qualité ne soit altérée, et la conformation du réseau complique les recherches.

Exportés débordés
Les experts sont "débordés" par le développement des espaces d'expression pédophiles, indique Werner Nowak, selon qui "Internet est une assiette de spaghettis": on peut diffuser le message d'un pays via le serveur d'un autre et brouiller les pistes. Le tout "dans un total anonymat".
Pour le moment, ces réseaux profitent aussi "du vide juridique", remarque Monique Loustau, de l'Association contre la prostitution enfantine (ACPE).

Qui poursuivre, et comment ? Ces réseaux ont pris de vitesse les lois et les experts, encore dépourvus de riposte. Et "ce n'est pas terminé": en plus des images réelles, "on va pouvoir diffuser sur les réseaux informatiques des images virtuelles, représentant toutes les scènes imaginables", prédit Mme Loustau.
Rien n'empêche en effet l'explosion des sites spécialisés. La plupart des messages sont de simples échanges d'information et d'images, mais de plus en plus servent à générer des revenus.
« Il suffit de montrer une demi image d'enfant nu, et d'afficher: « si vous voulez voir le reste, payez cinq dollars ». Ou de faire payer pour décrypter une image", explique M. Nowak.
Images et voyages
De plus, des pédophiles équipés de caméras vidéos filment leurs relations avec des enfants dans tous les pays, et vendent leurs images sur Internet "pour financer leurs voyages", affirme-t-il.
Selon lui, « aucune technologie ne peut stopper » ces diffusions, « ni même les filtrer » et « la police manque d'effectifs » pour les traquer. « Alors quand Internet aura 200 millions d'utilisateurs... »

De nombreux participants au congrès de Stockholm ont souligné l'urgence d'élaborer des stratégies de contrôle ou de répression. "L'explosion des communications, des transmissions satellites et Internet" représentent "un nouveau défi", celui "d'un monde sans frontières", reconnaît Ron O'Grady, coordinateur international d'ECPAT.
Sans compter, conclut Monique Loustau, que ces réseaux sont aujourd'hui sûrement très structurés et « bien conseillés ».
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Mouvement Parents Secours

«La Wallonie» du jeudi 29 août 1996 page 7

C'est en 1987 que l'ASBL Parents-Secours a vu le jour à Liège. L'association propose des animations de prévention générale dans les écoles maternelles et primaires.
Le mouvement a pour but la mise en place d'un réseau afin de réaliser le quadrillage des quartiers par des gens de confiance, prêts à assurer directement aide et protection aux enfants.

Depuis 1976, le Québec a lancé le mouvement Parents-secours qui a abouti à des résultats très concrets. Etre parents-secours, c'est apposer une affiche à sa fenêtre lorsqu'on est disponible. Il ne s'agit pas d'être présent constamment ou de modifier sa façon de vivre. L'objectif est simplement de se montrer prêt à aider un enfant en difficulté. Les membres s'identifient par une pancarte de couleur rouge sur fond blanc représentant un enfant donnant la main à un adulte. Cette affiche doit être placée bien en vue sur afin d'informer les enfants qu'ils peuvent, en cas de problème, s'adresser à cette maison et y trouver un refuge momentané.

Engagement
Le parents-secours est choisi suite à une enquête de moralité qui doit démontrer qu'il n'a pas de comportements dangereux. Son profil est d'être âgé de plus de 21 ans et d'habiter un rez-de-chaussée pour que la pancarte soit bien visible. Elle constitue un point de repère pour l'enfant qu'il soit perdu, malade, effrayé par un chien ou suivi par un inconnu, le parents-secours est là pour le rassurer et prévenir ses parents ou l'association si nécessaire. II n'est donc pas question qu'il s'attribue le rôle du médecin, du policier ou encore de reconduire l'enfant ou d'intervenir dans la vie familiale mais au contraire il doit toujours informer son comité et ne peut agir qu'avec l'accord de ce dernier.
L'association organise aussi des séances de prévention dans les écoles maternelles et primaires pour amorcer, chez les plus petits, des réflexes d' autoprotections ainsi que pour les sensibiliser à l'action des pancartes refuges.
Les animatrices disposent de cassettes vidéo réalisées avec le concours de psychologues. Une permanence de 24 heures sur 24 a été instaurée pour permettre aux membres recevant un enfant chez eux, ou aux enfants eux-mêmes vivant une crise familiale d'atteindre directement le siège du mouvement. De plus, pour répondre à certaines demandes, un système d'hébergement d'urgence a été prévu.
Intermédiaire
L'hébergement s'organise sur demande de la police ou du Tribunal de la Jeunesse pour éviter un placement institutionnel ou pour pallier à un manque de places disponibles dans des centres d'accueil et dès lors empêcher de déporter l'enfant dans un autre
Arrondissement judiciaire. L'association Parents-Secours sert également d'intermédiaire dans le signalement de situations de crise ou de danger pour les enfants.
Ainsi, en 1995, sur 219 nouveaux dossiers ouverts, 60 % concernent de la maltraitance et des abus sexuels. En Communauté française, l'action du mouvement est concrétisée par une implantation dans 52 villes réparties dans 7 arrondissements judiciaires. L'instauration d'une chaîne de solidarité de plus de 1300 familles prêtes à accueillir bénévolement un enfant pour parer au plus urgent ou tout simplement pour rassurer.
CH. D.
ASBL Parents-Secours. Rue Surlet 34, 4020 Liège. Tel 041/41.10.99. où Bip : 018/54.58.21.
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COMITÉ BELGE DE L'UNICEF

Lettre ouverte au ministre de l'Éducation


«La Wallonie» du jeudi 29 août 1996 page 7

Le drame vécu par Julie et Métissa ne doit plus se reproduire. C'est le souhait formulé par le Comité belge pour l'Unicef. Il demande aux ministres de l'Éducation des Communautés française et flamande de sensibiliser les enfants de toutes les écoles en mettant à leur disposition une information adaptée. Le comité belge pour l'Unicef espère que les enfants auront* l'occasion de s'exprimer en classe, dans la meilleure atmosphère qui soit, sur le drame qu'ils viennent de voir et d'entendre.

«Monsieur le Ministre,
L'Unicef, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance estime que plus d'un million d'enfants dans le monde sont forcés à se prostituer, font l'objet de trafic, sont vendus sur le marché du sexe et sont contraints de participer à la production de matériel pornographique. Les droits fondamentaux des enfants sont bafoués par l'industrie du sexe qui rapporte chaque année des milliards de dollars.
Le dramatique événement que nous venons de vivre en Belgique nous montre que l'exploitation' sexuelle des enfants touche les enfants dans pratiquement tous les pays du monde.

Le drame vécu par Julie et Métissa ne doit plus se reproduire. Comment réagissent nos enfants ? Comment ressentent-ils le drame relaté par les médias ? Ont-ils la possibilité d'en parler à leurs parents ? Les parents ont-ils les outils nécessaires pour en parler à leurs enfants ?

C'est dans ce contexte, Monsieur le Ministre, que nous faisons appel à vous.
Le Comité belge pour l'Unicef demande s'il est possible par l'intermédiaire du ministre de l'Education de sensibiliser tous les enfants au problème de l'exploitation sexuelle des enfants.
Cela pourrait se faire par une campagne d'information ou une journée de réflexions sur le sujet dans toutes les écoles. Les enfants auraient l'occasion d'exprimer leurs questions et recevraient une information adaptée et cela dans une atmosphère conviviale. Dans la mesure du possible, les parents seraient associés à l'information de leurs enfants.
Aujourd'hui, encore, lors de l'ouverture officielle du colloque sur l'exploitation sexuelle d'enfants à des fins commerciales à Stockholm, Carol Bellany, directeur général de l'Unicef, a rappelé l'importance de l'éducation pour prévenir l'exploitation sexuelle des enfants.
Il n'existe pas de panacée pour ce problème complexe. Mais notre travail nous a appris que l'éducation est particulièrement importante, a-t-elle affirmé. Les enfants ont une meilleure confiance en eux-mêmes lorsqu'ils connaissent leurs droits et leurs responsabilités.
Le Comité belge pour l'Unicef compte sur votre collaboration.»

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