Cinquante-huit questions mais pas de réponse
Cinquante-huit questions mais pas de réponse
« La Wallonie » du mardi 25 juin 1996
Il y avait du monde, dimanche au Palais des Congrès de Liège. C'est là que, à l'initiative du comité de soutien "Julie et Métissa", parlementaires belges, représentants du Service général d'appui policier, professeurs d'université, membres d'interpol, spécialistes des disparitions d'enfants et parents d'enfants disparus s'étaient donnés rendez-vous pour assister à une conférence de presse-débat, dont le but premier n'était autre de répondre à une question essentielle : que faut-il changer pour que soient prises en compte l'urgence et la spécificité des situations d'enlèvement et de disparition d'enfants?
C'est Louisa Lejeune, la maman de Métissa, qui a ouvert le débat, dimanche, en lisant une déclaration d'intention des parents des deux fillettes enlevées le 24 juin 1995 à Grâce- Hollogne.
« La Wallonie » du mardi 25 juin 1996
Il y avait du monde, dimanche au Palais des Congrès de Liège. C'est là que, à l'initiative du comité de soutien "Julie et Métissa", parlementaires belges, représentants du Service général d'appui policier, professeurs d'université, membres d'interpol, spécialistes des disparitions d'enfants et parents d'enfants disparus s'étaient donnés rendez-vous pour assister à une conférence de presse-débat, dont le but premier n'était autre de répondre à une question essentielle : que faut-il changer pour que soient prises en compte l'urgence et la spécificité des situations d'enlèvement et de disparition d'enfants?
C'est Louisa Lejeune, la maman de Métissa, qui a ouvert le débat, dimanche, en lisant une déclaration d'intention des parents des deux fillettes enlevées le 24 juin 1995 à Grâce- Hollogne.
Celle-ci s'articule autour de 58 questions, que les familles Russo et Lejeune se posent réellement depuis un an et qu'ils destinent « à l'institution judiciaire, au ministre de la Justice et aux autorités publiques en général ».
Manque de moyens
A travers l'énoncé de ces questions, les parents ont développé trois grands axes de réflexion :
Les mesures prises dans les premières heures de la disparition, la coordination de l'enquête et les (difficiles) relations familles-enquêteurs
« En ce qui concerne les deux premiers thèmes, notre intention n'est pas d'accuser les autorités judiciaires mais bien de montrer le manque de moyens accordés aux enquêteurs de première ligne et !a nécessité de créer une unité d'intervention qui puisse agir sur le plan local, national et international,en vertu d'un plan d'urgence coordonné »
« Notre expérience, comme d'autres expériences antérieures ou postérieures, a montré que cette police de première digne devant intervenir dans les premières heures n'était pas formée ni préparée à envisager !e pire, seule position qui permette de réduire les marges d'erreur ».
« Il faut donc changer les mentalités afin qu'une disparition qui au départ ne laisse aucune trace matérielle (...) puisse être l'objet de la mobilisation immédiate d'une équipe d'intervenants spécialisés. Ces derniers pourraient dépendre d'un magistrat national,lui même spécialisé, afin que les arrondissements judiciaires ne constituent plus un obstacle à leurs possibilités d'intervention ».
Les parents restent des parents
En ce qui concerne le troisième axe de réflexion, les relations entre les familles et !es enquêteurs, les parents de Julie et Mélissa ont tenu à insister sur la situation tout à fait particulière que doivent vivre les parents d'enfants victimes d'enlèvements ou de disparitions non élucidés.
« Les parents restent des parents et les enfants disparus restent leurs enfants.
Ce que réclament les parents est à la fois une plus ,grande efficacité dans l'intervention des autorités publiques et la possibilité d'être associés à la recherche de leurs enfants.
Faut-il beaucoup d'arguments pour faire comprendre que ce n'est pas parce qu'un enlèvement ou une disparition est mise à l’instruction judiciaire que les parents, en plus de la dépossession brutale de leurs enfants, doivent être également dépossédés de toute information et de toute collaboration avec les enquêteurs...»
58 questions
Et Louisa et Jean-Denis Lejeune, Carine et Gino Russo, d'énumérer tour à tour les questions qu'ils posent à la justice.
- Dont celles-ci : Pourquoi le maître chien n'a-t-il pas entamé son action au départ de la maison de Mélissa ?
- Pourquoi cinq juges d'instruction se sont-ils succédés dans les premières semaines ?
- La juge ne devait-elle pas refuser de prendre en charge te dossier puis qu'elle partait en vacances durant cinq semaines ?
- Pourquoi les effets scolaires des petites n'ont-ils pas été saisis immédiatement dans les bancs de l'école ? (C'est dans ce carnet rendu aux parents,15 jours après les faits, que se trouvait la phrase « Julie, à 17h00, on nira au manaige »)
- Combien de temps aurait-il fallu pour mettre en place un réseau de barrages routiers, de contrôles aux frontières et dans les aéroports ?
- Après la mise à jour récente d'activités pédophiliques organisées ayant des ramifications en Hollande et en Allemagne, les enquêteurs pensent-ils que l'hypothèse des réseaux internationaux de pédophilie doit encore être minimisée?
- Combien de temps faut-il aux enquêteurs pour évacuer la suspicion qui pèse sur J'encourage proche des victimes, notamment des parents ?
- L'information sur l'enquête concernant leurs propres enfants ne doit-elle pas être considérée comme un droit fondamental pour !es parents?
Didier Schyns
Oui les parents ont des droits
La Wallonie du mardi 25 juin 1996
Seul représentant d'un parquet à avoir répondu à l'invitation du comité de soutien "Julie et Mélissa", Guy Poncelet, procureur du Roi de Tournai, a tenu des propos très durs à l'encontre de Mme Doutrewe, la juge d'instruction liégeoise qui a en charge le dossier Julie et Mélissa.
«Je suis abasourdi, effaré,d'entendre les 58 questions que se posent les parents. Si le magistrat traite un dossier comme un simple numéro, on n'arrivera jamais à rien. Il doit faire preuve d'humanité. Tout est question de relations humaines. Il est inadmissible qu'aucune réponse n'ait été donnée aux parents Russo et Lejeune, sur de nombreux points. Je comprends parfaitement leurs angoisses et l'inacceptation d u silence dans lequel ils sont tenus... »
Manque de moyens
A travers l'énoncé de ces questions, les parents ont développé trois grands axes de réflexion :
Les mesures prises dans les premières heures de la disparition, la coordination de l'enquête et les (difficiles) relations familles-enquêteurs
« En ce qui concerne les deux premiers thèmes, notre intention n'est pas d'accuser les autorités judiciaires mais bien de montrer le manque de moyens accordés aux enquêteurs de première ligne et !a nécessité de créer une unité d'intervention qui puisse agir sur le plan local, national et international,en vertu d'un plan d'urgence coordonné »
« Notre expérience, comme d'autres expériences antérieures ou postérieures, a montré que cette police de première digne devant intervenir dans les premières heures n'était pas formée ni préparée à envisager !e pire, seule position qui permette de réduire les marges d'erreur ».
« Il faut donc changer les mentalités afin qu'une disparition qui au départ ne laisse aucune trace matérielle (...) puisse être l'objet de la mobilisation immédiate d'une équipe d'intervenants spécialisés. Ces derniers pourraient dépendre d'un magistrat national,lui même spécialisé, afin que les arrondissements judiciaires ne constituent plus un obstacle à leurs possibilités d'intervention ».
Les parents restent des parents
En ce qui concerne le troisième axe de réflexion, les relations entre les familles et !es enquêteurs, les parents de Julie et Mélissa ont tenu à insister sur la situation tout à fait particulière que doivent vivre les parents d'enfants victimes d'enlèvements ou de disparitions non élucidés.
« Les parents restent des parents et les enfants disparus restent leurs enfants.
Ce que réclament les parents est à la fois une plus ,grande efficacité dans l'intervention des autorités publiques et la possibilité d'être associés à la recherche de leurs enfants.
Faut-il beaucoup d'arguments pour faire comprendre que ce n'est pas parce qu'un enlèvement ou une disparition est mise à l’instruction judiciaire que les parents, en plus de la dépossession brutale de leurs enfants, doivent être également dépossédés de toute information et de toute collaboration avec les enquêteurs...»
58 questions
Et Louisa et Jean-Denis Lejeune, Carine et Gino Russo, d'énumérer tour à tour les questions qu'ils posent à la justice.
- Dont celles-ci : Pourquoi le maître chien n'a-t-il pas entamé son action au départ de la maison de Mélissa ?
- Pourquoi cinq juges d'instruction se sont-ils succédés dans les premières semaines ?
- La juge ne devait-elle pas refuser de prendre en charge te dossier puis qu'elle partait en vacances durant cinq semaines ?
- Pourquoi les effets scolaires des petites n'ont-ils pas été saisis immédiatement dans les bancs de l'école ? (C'est dans ce carnet rendu aux parents,15 jours après les faits, que se trouvait la phrase « Julie, à 17h00, on nira au manaige »)
- Combien de temps aurait-il fallu pour mettre en place un réseau de barrages routiers, de contrôles aux frontières et dans les aéroports ?
- Après la mise à jour récente d'activités pédophiliques organisées ayant des ramifications en Hollande et en Allemagne, les enquêteurs pensent-ils que l'hypothèse des réseaux internationaux de pédophilie doit encore être minimisée?
- Combien de temps faut-il aux enquêteurs pour évacuer la suspicion qui pèse sur J'encourage proche des victimes, notamment des parents ?
- L'information sur l'enquête concernant leurs propres enfants ne doit-elle pas être considérée comme un droit fondamental pour !es parents?
Didier Schyns
Oui les parents ont des droits
La Wallonie du mardi 25 juin 1996
Seul représentant d'un parquet à avoir répondu à l'invitation du comité de soutien "Julie et Mélissa", Guy Poncelet, procureur du Roi de Tournai, a tenu des propos très durs à l'encontre de Mme Doutrewe, la juge d'instruction liégeoise qui a en charge le dossier Julie et Mélissa.
«Je suis abasourdi, effaré,d'entendre les 58 questions que se posent les parents. Si le magistrat traite un dossier comme un simple numéro, on n'arrivera jamais à rien. Il doit faire preuve d'humanité. Tout est question de relations humaines. Il est inadmissible qu'aucune réponse n'ait été donnée aux parents Russo et Lejeune, sur de nombreux points. Je comprends parfaitement leurs angoisses et l'inacceptation d u silence dans lequel ils sont tenus... »
Pour Guy Porcelet, qui vient de traverser une terrible épreuve lui aussi avec l'assassinat, en février dernier, de son fils, inspecteur à la PJ de Mons, les droits des victimes sont totalement insuffisants.
« Il n'y a rien de plus insupportable que le silence. Même si je ne connais pas le dossier relatif à l'enlèvement de Julie et Métissa, il est clair que certaines réponses auraient pu être données aux parents, sans pour cela violer le secret de l'instruction. Ces parents ont des droits. Le droit à une certaine information, mais aussi le droit d'être rassurés »
Accès contrôlé au dossier...
« Il n'y a rien de plus insupportable que le silence. Même si je ne connais pas le dossier relatif à l'enlèvement de Julie et Métissa, il est clair que certaines réponses auraient pu être données aux parents, sans pour cela violer le secret de l'instruction. Ces parents ont des droits. Le droit à une certaine information, mais aussi le droit d'être rassurés »
Accès contrôlé au dossier...
Guy Poncelet poursuit son plaidoyer, sur le thème du sacro-saint principe du secret de l'instruction.
«Je reste un partisan du secret d'instruction, mais je ne puis accepter qu'aucune information ne soit donnée aux parents, sous couvert de ce principe. Je suis le premier à admettre que si on donne l'accès au dossier à tout le monde, et dans n'importe quelles conditions, on finira par organiser la transparence totale, ce qui n'est pas souhaitable. Mais il me semble aussi que les parents doivent avoir un droit d'accès contrôlé au dossier. De deux choses l'une : ou on continue à ignorer les victimes de manière scandaleuse, ou on accepte de leur donner un accès partiel au dossier... »
Des propos courageux, qui ne feront assurément pas plaisir à tout le monde... « Le droit de réserve n'est imposé que par ceux que cela dérange », indique Guy Poncelet. « Je suis au terme de ma carrière et j'assume la responsabilité de mes propos. Et puis, vous savez, j'estime que ce qui est arrivé au mois de février dernier me donne le droit de parler. Si tout le monde se tait, on ne fera pas avancer les choses. J'en ai marre de ces autoroutes qui ne mènent nulle part... »
Guy Poncelet préconise, reprenant en cela le projet d'Anne-Marie Lizin, la création d'une cellule nationale spécialisée dans la recherche d'enfants disparus ou enlevés. « Cette cellule devrait avoir de larges contacts internationaux», note le PR de Tournai.
«Elle serait chargée de récolter toutes les informations et de coordonner le travail. Car il doit s'agir d'un véritable travail en commun avec les enquêteurs de proximité qui, sur le terrain, sont et restent indispensables. Ma carrière de magistrat m'a permis de constater qu'il y a de trop nombreux dysfonctionnements entre les différentes forces de police... La supervision de ce type d'enquête par un magistrat national permettrait d'y pallier... »
D.S.
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Sur Internet...
La Wallonie du mardi 25 juin 1996
Les 58 questions que se posent les parents de Julie et Métissa sur le fonctionnement de la justice et la méthodologie de l'enquête peuvent être consultées sur Internet à l'adresse suivante :
http://ourworld.compuserve.com/homepages/Julie-Melissa , sous la rubrique "Nouvelles". S'y trouvent aussi toute autre information en rapport avec l'enlèvement, la situation des parents Russo et Lejeune ainsi que... la page spéciale que "La Wallonie" a consacré, hier, à ce qui est devenu l'affaire Julie et Mélissa.D.S.
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Sur Internet...
La Wallonie du mardi 25 juin 1996
Les 58 questions que se posent les parents de Julie et Métissa sur le fonctionnement de la justice et la méthodologie de l'enquête peuvent être consultées sur Internet à l'adresse suivante :
Cela étant, Dominique Laloux, qui a introduit sur Internet tous ces documents, a tenu à préciser, en rapport avec les accusations de Jacques Mercier, chef de groupe à Interpol Lyon (voir notre édition d'hier), que « si Interpol n'a pu avoir les photos des deux fillettes avant quatre mois, les dizaines de millions d'utilisateurs de l'Internet en disposaient déjà à la date du 6 juillet, par le biais d'un site situé en Italie, puis par CompuServe, puis par l'Ambassade de Belgique à Washington. Les photos, de très bonne qualité, sont d'ailleurs encore sur ces deux derniers serveurs...
Il ajoute : Peut-être serait-il intéressant de souligner l'intérêt potentiel d'un tel système de distribution ries photos d'enfants disparus ou enlevés. J'ai eu l'occasion, dimanche à Liège, de m'entretenir avec Elisabeth Yore (1) et elle m'aidera à voir avec CompuServe comment un Forum "Missing Children" européen (traduction : enfants disparus) pourrait âtre envisagé. C'est sans doute une piste à suivre pour améliorer la distribution... »
D. S.
(1) E. Yore est directrice des Relations internationales du National Center for Missing and Eploited Children, une institution privée reconnue par le Congrès américain. Celle-ci travaille en collaboration avec l'autorité publique et le FBI à la lutte contre la criminalité dont les enfants sont les victimes.
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